Dans une ville pas si lointaine que ça mais dans un tout autre temps, un prince prénommé Ballaach régnait sur ce qu’on appellerait bien des siècles plus tard « la plus grande Cité médiévale d’Europe ». Ce prince ne le savait pas encore mais c’est ici, à Carcassonne, et face à cet empereur avide de faire réintégrer la ville dans son empire, Charlemagne, qu’il allait mourir. Mais rangez vos mouchoirs car, heureusement pour nous, l’H/histoire ne s’arrête pas là ! Loin de là ! Parce que les hommes, c’est bien beau quand il faut « bling-bling » avec des épées mais quand il faut faire preuve d’intelligence pour s’en sortir, le personnage principal devient une femme ! Eh ! Oui ! D’ailleurs, figurez-vous qu’après avoir pleuré son mari (bah oui, quand même…), la veuve du prince, aussi connue sous le nom de Dame Carcas, décida de prendre le contrôle des troupes de combat et elle tint bon face à l’armée du grand empereur.
Mais ce sacré, sacré Charlemagne n’avait pas « inventé » l’école pour rien. Il avait plus d’une idée folle dans son sac de petit écolier et décida tout simplement d’assiéger la Cité. « Rends-toi vieille carcasse, tu es cernée. Tu n’as plus aucune chance. Si tu ne sors pas de tes remparts, tu périras sous les grondements de la faim. Alors que si tu te rends, tu finiras au bûcher. Oui ! Ton heure a sonné mais si tu es douée de raison, laisse une chance à ton peuple de s’en sortir. Je t’attends. » Et il attendit… il attendit… il attendit… Pendant cinq années… Oui ! Cinq années durant – alors qu’il aura fallu moins de cinq secondes à son prince pour tomber au pied du château – cette ancêtre de Jeanne d’Arc ne plia pas.
Sauf que… cinq and de siège, c’est long… Et Carcassonne, c’est pas la Terre Sainte, la nourriture ne s’étendait pas à perte de vue. Elle n’était pas inépuisable non plus. Et là, une question se posa : qu’est-ce qui avait le plus de chance de l’emporter : l’ego d’un homme ou la fierté d’une femme ? Charlemagne campa sur ses positions… mais il devait se rendre à l’évidence : lui aussi commençait à avoir faim. Dame Carcas réfléchit, réfléchit et réfléchit encore un peu plus. Elle voyait bien que son peuple s’amincissait et que son armée ne résisterait pas à une nouvelle attaque. Mais plutôt que de fléchir, elle décida de jouer sur la psychologie de son adversaire. Et « eurêka » !
La maîtresse de la Cité fit remplacer les sentinelles faméliques par des gaillards pouvant résister à trente nouvelles attaques minimum. Comment ça ? Elle demanda aux hommes de rassembler le peu de paille qu’il restait dans la cité et aux femmes de confectionner de nouvelles tenues (c’est une féministe du Moyen-Age, pas du 19ème siècle). On fourra les costumes et chaque fois qu’une sentinelle venait à mourir, elle était remplacée par un mannequin. Mais ce n’était là qu’une petite farce. La grande ruse, et très certainement le plus grand risque pris par Dame Carcas, aura été d’engraisser le dernier porcelet de la Cité avec ce qui restait de blé avant… de le projeter par-dessus la muraille. Et elle attendit, elle attendit, elle attendit… moins de cinq ans !
La réaction de Charlemagne ne se fit pas attendre. Le Grand Charles tomba dans le piège ! Pensant qu’il n’avait aucune chance face à une ville où la nourriture était si abondante que l’on lançait les cochons bien gras pour narguer l’adversaire, il décida de rentrer à Aix-la-Chapelle manger un bon faisan rôti ! Le dernier des soldats de l’armée de Charlemagne n’avait pas encore eu le temps de disparaitre à l’horizon que déjà Dame Carcas fit sonner les cloches pour signaler à son peuple qu’ils avaient gagné. Et comme pour faire écho aux sons des cloches, les paysans se mirent à crier de joie « Carcas sonne ! ».
Bon, okay, j’ai un peu réécrit l’histoire à ma façon mais la légende est vraie ! Je ne l’ai pas inventée. Je ne pouvais pas passer à côté de la Cité sans vous en parler et plutôt que de vous assommer avec l’histoire des Francs, des cathares, de Violet le Duc et j’en passe, j’ai préféré vous raconter sa petite histoire le temps d'une pause sur l'autoroute.